J'avais un rêve. Celui de travailler auprès d'autistes et de les accompagner vers l'autonomie autant que faire se peut.
Lorsque je suis entrée en formation, je prévoyais de faire mon stage long dans une structure dont le projet institutionnel viserait au maximum cette autonomie dans le respect de l'individu, de ses besoins, de ses projets.
J'ai trouvé cette structure ! J'ai postulé pour le stage et même pour y travailler un peu avant, comme job d'été, pour un premier contact.
C'est la catastrophe ! Je suis horrifiée ! Je me sens tout à coup désemparée, impuissante.
C'était un rêve sur le papier et c'est un cauchemar en réalité.
Je viens de faire trois jours et j'ai la nausée. Moi qui était si emballée par l'idée de bosser pour une structure innovante !
Les intervenants sont maltraitants au possible.
Dès le premier jour, on m'a dit : n'hésites pas à crier (crier sur un autiste ? Quel intérêt éducatif ?), si ils ne t'écoutent pas, tu les arroses (violent et agressif !), si ils sont constipés, tu les enfermes à clefs aux toilettes une heure ou deux (incroyable mais vrai !) ...
Dès le premier jour, la fille avec qui je travaillais m'a dit que j'étais trop douce que je devais être plus ferme.
Je lui ai expliqué que je pouvais être ferme sans hurler. Je lui ai dit que je ne jetterai pas de verre d'eau à la figure des personnes pour qui je venais travailler, que je n'enfermerai personne à clefs.
Je passe pour une idéaliste, on m'a dit que je changerais.
Ma position de stagiaire ne me laisse que peu de marges de manoeuvre. Soit je dénonce au président et je prends le risque de me faire virer ou exclure rapidement, soit je reste et tente de changer tout ça petit à petit.
Je pense que la seconde solution est la plus judicieuse.
Hier, on m'a demandé d'attacher les bras d'une jeune fille dans un tablier, façon camisole, afin qu'elle n'envoie pas valser la nourriture pendant son repas puis de mettre une protection à une autre jeune fille pour "être tranquille".
J'ai refusé, j'ai dit que je m'en occuperai. J'ai nettoyé trois fois la nourriture tombée par terre et le repas s'est terminé dans le calme, j'ai eu le droit aux plus beaux sourires du monde.
Quant à l'autre jeune fille (une douce princesse, une rencontre coup de coeur !), même si elle ne parle pas, elle sait très bien se faire comprendre et demander à aller aux toilettes.
Je me demande qu'est ce qui peut bien motiver les personnes à bosser dans ce secteur si derrière il n'y a pas d'humanité.
Alors oui, je dois être une idéaliste.
Hier, alors que doucement je m'adressais à un résident (je dis toujours à l'autre qui lui parle, ce que je vais faire -lors d'un soin par exemple- afin de ne pas lui faire peur et de ne pas être intrusive), ma collègue est intervenue en lui hurlant dessus. Il s'est exécuté, immédiatement. Il était terrifié.
Ma collègue, toute fière m'a dit "tu vois, si tu cries pas, ils comprennent rien, arrête de faire la nounou avec eux"
Ils comprennent tout. Je ne pense pas que ce soit faire la nounou que de s'adresser à eux avec respect ou encore de refuser de mettre une couche à une personne qui n'en a pas besoin.
Et toute la journée, ils sont dans l'inactivité. J'ai proposé des activités manuelles, ma collègue m'a dit : "ils veulent rien faire, ils savent rien faire"
Le lendemain, j'ai ramené des feutres et nous avons dessiné. Ils ont adoré ! Certains ont un temps de concentration plus court et d'autres ont besoin d'aide car leur motricité est amoindrie mais qu'importe, on a passé un bon moment.
Un jeune homme m'a raconté tout ce qu'il posait sur le papier. L'échange est là, je sais pourquoi j'ai choisi ce métier.
Je suis triste aujourd'hui, face à mon impuissance mais je ne baisse pas les bras, je vais rester et me battre pour faire accepter à mes collègues des pratiques professionnelles respectueuses dans un premier temps et bien traitantes dans un second temps.
Et quand je douterai de ma capacité à y parvenir, je retournerai donner la main à Emilie, cette jolie jeune fille qui ne me regarde jamais mais qui sourit lorsque je lui parle doucement en lui tapotant la main.
Merci d'avance d'avoir lu ce topic où je m'épanche un peu. Si vous avez des solutions à proposer, je suis à l'écoute.
Lorsque je suis entrée en formation, je prévoyais de faire mon stage long dans une structure dont le projet institutionnel viserait au maximum cette autonomie dans le respect de l'individu, de ses besoins, de ses projets.
J'ai trouvé cette structure ! J'ai postulé pour le stage et même pour y travailler un peu avant, comme job d'été, pour un premier contact.
C'est la catastrophe ! Je suis horrifiée ! Je me sens tout à coup désemparée, impuissante.
C'était un rêve sur le papier et c'est un cauchemar en réalité.
Je viens de faire trois jours et j'ai la nausée. Moi qui était si emballée par l'idée de bosser pour une structure innovante !
Les intervenants sont maltraitants au possible.
Dès le premier jour, on m'a dit : n'hésites pas à crier (crier sur un autiste ? Quel intérêt éducatif ?), si ils ne t'écoutent pas, tu les arroses (violent et agressif !), si ils sont constipés, tu les enfermes à clefs aux toilettes une heure ou deux (incroyable mais vrai !) ...
Dès le premier jour, la fille avec qui je travaillais m'a dit que j'étais trop douce que je devais être plus ferme.
Je lui ai expliqué que je pouvais être ferme sans hurler. Je lui ai dit que je ne jetterai pas de verre d'eau à la figure des personnes pour qui je venais travailler, que je n'enfermerai personne à clefs.
Je passe pour une idéaliste, on m'a dit que je changerais.
Ma position de stagiaire ne me laisse que peu de marges de manoeuvre. Soit je dénonce au président et je prends le risque de me faire virer ou exclure rapidement, soit je reste et tente de changer tout ça petit à petit.
Je pense que la seconde solution est la plus judicieuse.
Hier, on m'a demandé d'attacher les bras d'une jeune fille dans un tablier, façon camisole, afin qu'elle n'envoie pas valser la nourriture pendant son repas puis de mettre une protection à une autre jeune fille pour "être tranquille".
J'ai refusé, j'ai dit que je m'en occuperai. J'ai nettoyé trois fois la nourriture tombée par terre et le repas s'est terminé dans le calme, j'ai eu le droit aux plus beaux sourires du monde.
Quant à l'autre jeune fille (une douce princesse, une rencontre coup de coeur !), même si elle ne parle pas, elle sait très bien se faire comprendre et demander à aller aux toilettes.
Je me demande qu'est ce qui peut bien motiver les personnes à bosser dans ce secteur si derrière il n'y a pas d'humanité.
Alors oui, je dois être une idéaliste.
Hier, alors que doucement je m'adressais à un résident (je dis toujours à l'autre qui lui parle, ce que je vais faire -lors d'un soin par exemple- afin de ne pas lui faire peur et de ne pas être intrusive), ma collègue est intervenue en lui hurlant dessus. Il s'est exécuté, immédiatement. Il était terrifié.
Ma collègue, toute fière m'a dit "tu vois, si tu cries pas, ils comprennent rien, arrête de faire la nounou avec eux"
Ils comprennent tout. Je ne pense pas que ce soit faire la nounou que de s'adresser à eux avec respect ou encore de refuser de mettre une couche à une personne qui n'en a pas besoin.
Et toute la journée, ils sont dans l'inactivité. J'ai proposé des activités manuelles, ma collègue m'a dit : "ils veulent rien faire, ils savent rien faire"
Le lendemain, j'ai ramené des feutres et nous avons dessiné. Ils ont adoré ! Certains ont un temps de concentration plus court et d'autres ont besoin d'aide car leur motricité est amoindrie mais qu'importe, on a passé un bon moment.
Un jeune homme m'a raconté tout ce qu'il posait sur le papier. L'échange est là, je sais pourquoi j'ai choisi ce métier.
Je suis triste aujourd'hui, face à mon impuissance mais je ne baisse pas les bras, je vais rester et me battre pour faire accepter à mes collègues des pratiques professionnelles respectueuses dans un premier temps et bien traitantes dans un second temps.
Et quand je douterai de ma capacité à y parvenir, je retournerai donner la main à Emilie, cette jolie jeune fille qui ne me regarde jamais mais qui sourit lorsque je lui parle doucement en lui tapotant la main.
Merci d'avance d'avoir lu ce topic où je m'épanche un peu. Si vous avez des solutions à proposer, je suis à l'écoute.