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par La Variabilité cognitive.
Rappel des théories classiques du développement cognitif.
L’âge est la pensée de l’enfant progresse de manière simultanée. La théorie de Jean Piaget décrit ainsi différents stades de développement :
- le stade sensori-moteur entre 0 et 2 ans
- le stade préparatoire entre 2 et 7 ans
- le stade opératoire concret entre 7 et 12 ans
- le stade des opérations formelles au-delà de 12 ans
J.Bruner a décrit différents stades dans les formes de représentations mentales chez l’enfant :
- d’abord énactives c’est à dire basées sur l’action
- représentations Iconiques
- et représentations symboliques.
L. Kohlberg s’est intéressé au développement moral de l’enfant, qu’il envisage également en stade. La plupart des théories classiques du développement sont donc ce qu’on peut appeler « stadistes ».
Le développement cognitif ressemblerait à la montée d’escaliers, l’enfant progresserait ainsi d’étape en étape, comme on monte un escalier marche par marche. Cependant, les recherches accumulées au fil des années ont remis en doute l’hypothèse d’un développement par stades successifs.
Critiquer les théories qui postulent une relation étroite entre l’âge et le mode de pensée ne signifie pas qu’on les discrédite totalement. Elles ont stimulé la création de méthodes de plus en plus ingénieuses pour démontrer que les bébés et les jeunes enfants « ont » ou « n’ont pas » les compétence en question. Enfin, elles ont généralement conduit à élaborer une base de données de plus en plus riche sur le développement.
Les enfants sont inconstants.
Il peut paraitre étonnant, surtout pour un adulte, de postuler une variété de stratégies possibles pour un simple calcul mental. Car la plupart des adultes résolvent les problèmes arithmétiques simples en récupérant la réponse de mémoire.
Mais chez les enfants, la situation est différente. Ils utilisent une très grande diversité de stratégies pour résoudre ce qui constitue pour eux de réels problèmes.
Les stratégies qu’ils emploient varient considérablement au fur et à mesure que l’enfant grandit et acquière de l’expérience.
Exemple des différentes stratégies d’un enfant pour calculer 2+3 :
Les expériences de Robert S. Siegler sur le calcul mental montrent que les enfants savent utiliser parallèlement plusieurs stratégies mentales, même si l’une d’elle reste dominante.
Pour un seul problème plusieurs stratégies sont possibles. Pour un simple calcul mental comme 2+3=? L’enfant de 5 ans peut :
- compter sur ses doigts oralement
- compter sur ses doigts mentalement
- compter mentalement ans support
- retrouver la réponse de mémoire.
Pour un même problème, un enfant peut une première fois utiliser la stratégie la plus mature (retrouver la réponse de mémoire) et pourtant la fois suivante compter sur ses doigts.
Les expériences de R.S. Siegler montre combien le choix d’une stratégie dépend des contraintes du contexte. Si par exemple l’adulte demande de résoudre le plus de calculs possibles en un temps limité, l’enfant va privilégier la recherche de mémoire. Par contre, si la consigne est de faire le moins d’erreur possible, la méthode de comptage sur les doigts sera choisie.
Ce comportement de l’enfant montrent combien le choix d’une stratégie se fait en fonction d’un objectif, de façon adaptée.
Si plusieurs stratégies peuvent Coexister à un moment donné, l’une ou l’autre d’entre elles est généralement dominante.
L’utilisation de stratégie cognitives variées est loin d’être réservée au calcul, pour épeler un mot par exemple, un enfant de CP et CE1 le feront parfois de façon phonétique, parfois par analogie entre le mot et un mot plus connu, et parfois les épellent de mémoire. (idem pour lire l’heure ou retenir une suite numéraire comme un numéro de téléphone).
La variabilité cognitive commence tôt : un bébé d’un an, encouragé par sa mère pour descendre un plan incliné, il peut le faire à quatre pattes, ou en rampant, la tête en avant ou les pieds d’abord, ou glisser sur les fesses. La variabilité cognitive est d’ailleurs présente chez tout les individus à travers le monde.
La découverte de nombreuses compétences précoces chez le bébé a également remis en question les modèles classiques. Dès l’âge de 2 semaines, les bébés sont capables d’imiter des comportements observés chez autrui. Dès l’âge de 4 mois, ils manifestent par leur comportement qu’ils comprennent que les objets ne cessent pas d’exister lorsqu’on ne les voit plus, alors que selon Piaget, cette aptitude n’apparaît pas avant 8 mois.
Donc le développement ressemblerait à une série de vagues qui se chevauchent, chacune correspondant à un mode de pensée ou à une stratégie différente. L’apprentissage passe par une variabilité de stratégies dont l’utilisation évolue dans le temps. Chaque stratégie a donc pu chevaucher une autre, tout en allant progressivement vers l’adoption de la plus efficace ou la plus sûre.
Mais reconnaitre la variabilité cognitive implique de répondre à une autre question ignorée par les approches traditionnelles : comment les enfants choisissent-ils entre les différentes stratégies dont-ils disposent?
Le choix du mode de raisonnement.
Il dépend des caractéristiques du problème : si le problème est facile, l’enfant peut se permettre de choisir une stratégie rapide. En revanche face à un problème plus complexe, il va utiliser une méthode plus exigeante en temps et en efforts. Comme pour les bébés qui descendent d’un plan incliné : si la pente est douce, les bébés utilisent leur mode de locomotion habituel. En revanche au fur et a mesure que la pente augmente, ils adoptent des stratégies de plus en plus sûres, comme glisser sur le ventre ou les fesses.
Les études ont montré que les enfants disposant du plus grand nombre de stratégies différentes au début d’une épreuve étaient aussi ceux qui apprenaient le mieux.
Un changement Continu.
Les théories classiques, qui comparent le développement à un escalier, considèrent le changement comme discontinu et rare. Il est vrai que la pensée Piagétienne (stadiste) s’est montré également sensible à la nécessité d’expliquer le changement. Il a ainsi fait l’hypothèse d’une plus grande variabilité de la pensée au cours des brèves périodes de transition, et considérait cette variabilité comme déterminante pour le changement cognitif. Il a également admis que les structures cognitives changeaient continuellement de manière subtile grâce aux processus d’assimilation et d’accomodation.
Les études qui ont observé précisément les changements de pensée de l’enfant montrent combien il parait graduel. Longtemps après avoir appris de nouvelles et meilleures stratégies, l’enfant continue à en utiliser de plus anciennes et moins efficaces. L’utilisation de nouvelles stratégies n’augmente que doucement : le changement parait donc bien continue.
